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lundi 24 août 2015

Ukraine Reconquista


« Certains Européens dont les pays ne faisaient pas partie du Pacte de Varsovie croient que la Russie a du courage de s’opposer aux États-Unis et que Poutine est un président fort et brave. Et bien, non. Nous, les Ukrainiens, ainsi que les Baltes, les Polonais, les Tchèques et les Géorgiens, nous savons ce qu'est vraiment la Russie. »

Elena est journaliste indépendante, militante associative et bénévole. Elle apporte de l'aide aux soldats et aux enfants démunis, qu'ils soient déplacés ou orphelins à cause du conflit. Elle a une formation de traductrice interprète et a répondu dans la langue de Bossuet aux questions d'Ukraine Reconquista.
 
Son témoignage est très précieux pour comprendre la situation dans le sud-est du pays et les difficultés rencontrées par les militaires ukrainiens dans l'exercice de leur mission. Car parfois, l'ennemi ne se situe pas seulement dans le camp d'en face...
 


Ukraine Reconquista : Pourquoi menez-vous ce combat ?
 
Elena : En tant qu’ukrainienne, je ne peux pas rester indifférente aux événements qui secouent mon pays. Je suis bien entendu redevable envers les soldats ukrainiens qui sont partis se battre et donner leur santé et leur vie pour que moi et les gens comme moi puissent vivre normalement, dormir tranquillement dans nos lits et ne pas voir les séparatistes dans nos villes. Donc, mon devoir est d’aider nos soldats, je trouve cela tout à fait normal.
 
Vous savez, je voyage dans l’est, je dors dans les unités militaires, je peux vous dire que les soldats vivent dans des mauvaises conditions, ils sont mal logés, mal nourris, ils achètent eux-mêmes leurs tenues. En ce moment, mes amis d’une unité d’artillerie partent en mission pour 24 heures, durant lesquelles ils restent dans des champs au plein soleil, il fait 30-35 degrés àl’ombre et l’État ne leur donne qu’un litre et demi d’eau par personne par jour. C’est épouvantable ! Cependant, ils restent à faire leur devoir, à nous protéger et ils ne se plaignent pas. Je trouve cela tellement admirable.
 
On fait ce qu’on peut pour les épauler, pour qu’ils ne se sentent pas seuls et qu’ils sachent que nous leur sommes très reconnaissants ! On aide aussi les soldats blessés et les familles dont un membre est mort à la guerre. J’essaye d’aider aussi les enfants venus du Donbass. Chaque enfant doit avoir une enfance normale, pas fuir sa ville natale pour se sauver des bombes et voir ses proches mourir. Ils ne doivent pas souffrir à cause des conneries faites par les adultes. Donc, on essaye d’améliorer un peu leur quotidien.
 
D’ailleurs, j’ai eu de la chance de connaitre des Français sensibles aux malheurs des Ukrainiens qui nous aident énormément, notamment Monsieur Cyril Bogaert, de l'ONG France Ukraine Solidarité, et d’autres activistes et je profite de cette occasion pour leur remercier encore pour leur aide qui nous est bien précieuse.
 
 
Quelle est la situation sur le front de l'est face aux séparatistes pro-russes ?
 
Et bien, la situation s’est un peu améliorée avec les Accords de Minsk. Je sais qu’il y a beaucoup de gens qui critiquent ces Accords qui ne sont sûrement pas parfaits et qui sont constamment violés par les séparatistes et les militaires russes.
 
Il faut avouer qu’avec la signature de ces Accords, il y a quand même moins de morts parmi nos militaires, que l’année dernière, lors de batailles de Savour-Mohyla, Illovaysk ou de Debaltzeve au mois de février 2015, mais le but est c’est qu’il n’y en ait plus du tout. Malheureusement, ce n’est pas le cas, les militaires et les civils périssent pratiquement tous les jours dans le Donbass. Après un certain calme qui a duré de la fin de mois de février jusqu’au mois de juin, les hostilités ont repris. Toute la ligne du front est à nouveau enflammée.
 
 
La Russie est-elle partie prenante militairement ?
 
Mais très certainement ! Il y a toutes sortes de preuves de la présence des militaires russes dans le Donbass. Les images satellites où l'on voit les unités militaires et les armements russes en train de traverser la frontière russo-ukrainienne ont été montrées lors des réunions du Conseil de l’ONU.
 
Les militaires ukrainiens transmettent à l’État-major ukrainien les papiers et les affaires (les chevrons, les armes) des militaires russes tués sur le champs de bataille, plusieurs soldats russes se sont faits prisonniers.
 
Sur les réseaux sociaux, les journalistes découvrent les selfies des soldats russes dans les villes et villages ukrainiens... Un journaliste américain, Simon Ostrovsky, a réalisé une excellente enquête durant laquelle il a suivi le parcours d’un militaire russe de sa ville en Russie jusqu’à Debaltseve en Ukraine. Et même Vladimir Poutine a fini par avouer que les fameux « hommes verts » en Crimée avaient été les militaires russes. Je conseille de lire le rapport de Boris Nemtsov [NDLR : député de l'opposition, ancien vice-président de la Fédération de Russie et ancien ministre assassiné le 27 février 2015 à Moscouqui contient beaucoup de preuves de l’implication de la Russie dans ce conflit.
 
 
Est-ce une guerre civile entre des Ukrainiens de l'ouest et des Ukrainiens de l'est ?
 
L’est de l’Ukraine est un large territoire qui comprend plusieurs régions : d’Odessa, de Kharkiv, de Dniepropetrovsk, de Zaporijia. Les habitants de ces régions mènent une vie normale comme tous les autres Ukrainiens. Dans le Donbass, les gens vivaient aussi normalement jusqu’à ce que la Russie se mette à soutenir les séparatistes, d’abord en envoyant les officiers du FSB pour lancer le mouvement séparatiste et les armes et les soldats ensuite afin de maintenir la guerre.
 
 
Qu'avez-vous à répondre aux nationalistes d'autres pays européens qui vous accusent de « rouler pour les Americains » ?
 
Les Américains n’ont pas annexé une partie de territoire ukrainien, les Américains n’ont pas soutenu le mouvement séparatiste dans une partie de l’Ukraine, les Américains ne nous envoient pas les armes et il n’y a pas de soldats américains dans le Donbass. Tout cela, c’est la Russie qui le fait.
 
Nous ne sommes pas en train de rouler pour les Américains ou les Européens. Nous sommes en train de nous battre pour construire un nouveau pays, un pays avec des valeurs démocratiques universelles.
 
Certains Européens dont les pays ne faisaient pas partie du Pacte de Varsovie croient que la Russie est un beau pays, qui a du courage de s’opposer aux États-Unis et gouverné par un Président fort et brave. Et bien, non. Nous, les Ukrainiens, ainsi que les Baltes, les Polonais, les Tchèques, les Géorgiens, nous savons c’est qu'est vraiment la Russie. 
 
C’est un pays totalitaire, dont le gouvernement corrompu et mafieux a peur de la réussite des pays post-soviétiques, car si les Russes voient que l’Ukraine et la Géorgie deviennent des pays démocratique et développés, ils ouvriront les yeux sur une triste vie que leur gouvernent leur impose.
 
 
Dans quelles conditions combattent les soldats ukrainiens ? Sont-elles différentes de celles rencontrées par les volontaires issus de la société civile ?
 
Malheureusement, les conditions sont indignes des soldats qui se battent pour la liberté de leur pays. Ils reçoivent un tout petit salaire, ils achètent eux-mêmes les tenues, les gilets pare-balles et les chaussures ou bien ce sont des bénévoles qui leur ramènent tout cela, ils sont mal approvisionnés, mal armés et mal nourris.
 
Pour les volontaires c’est encore pire, ils ne sont pas du tout payés par l’État. Et si un volontaire est tué, sa famille ne recevra aucune aide, aucune prestation. Mais malgré tout, les militaires de l’armée régulière et des bataillons de volontaires gardent un esprit combattif et sont prêts à donner leur vie pour l’Ukraine et le peuple ukrainien.
 
 
Quel est le coût matériel et humain de cette guerre sur les populations civiles de l'est ?
 
Il est très difficile de le dire. Au mois de mai, le président ukrainien Petro Porochenko a déclaré que le nombre des victimes de guerre dans le Donbass atteint près de 9 000 personnes : 1 700 militaires et 7 000 civils, mais il est fort probable que ce chiffre soit volontairement réduit.
 
Les soldats des bataillons de volontaires ne sont pas comptés et, au début du conflit, ce sont eux qui ont participé aux combats les plus sanglants. Beaucoup de militaires et de civils sont portés disparus, donc on ne sait pas s’ils sont morts ou pas. Quant au coût matériel de cette guerre, on parle déjà des milliards de dollars de dégâts, mais pour le moment, aucune estimation exacte n’est possible. Par exemple, on ne peut pas examiner les dégâts dans les localités contrôlés par les séparatistes.
 
 
Les populations civiles de l'est sont-elles pro-russes comme on le croit à l'étranger ?
 
Les habitants du Donbass ont toujours été assez proches de la Russie historiquement.
 
Economiquement, il y a beaucoup de liens familiaux entre eux et de nombreux habitants du Donbass parlent russe. Mais la Russie ne détient pas le droit de la langue : on peut être Ukrainien et parler russe, tout comme on peut être Suisse ou Belge et parler français sans être pro-français ou vouloir vivre en France. En plus, si dans des grandes villes comme Donetsk, les gens parlent très souvent russe, à la campagne, même à 15 km de la frontière russe, les gens parlent en ukrainien.
 
Les Ukrainiens et les Russes ont longtemps vécu dans un seul pays, donc nous étions toujours proches. À l’époque du Maidan, au plein milieu de la propagande anti-ukrainienne, un attentat a eu lieu à Volgograd en Russie. Plusieurs personnes ont été tuées. Nous, les Ukrainiens, on pleurait avec le peuple russe, on a ramené des centaines de bougies à l’ambassade de la Russie à Kiev, on a fait une cérémonie de deuil sur Maidan. Mais l’annexion de la Crimée et la guerre dans le Donbass ont tout changé. J’ai entendu plusieurs déplacés du Donbass dire qu’ils détestaient les Russes car ils ont détruit leur vie. Et ils disaient cela en langue russe, s’il vous plaît.
 
 
Le haut de l'armée soutient-il les soldats qui risquent leur vie ou est-il corrompu ?
 
Malheureusement, la corruption est toujours là même si on aperçoit certaines améliorations. À titre d’exemple, le ministère de la Défense a accepté de coopérer avec des bénévoles et des activistes civils qui développent des programmes d’aide aux soldats : approvisionnement, soutien psychologique, aide juridique, réhabilitation, aide aux familles des soldats blessés ou défunts. J’espère aussi que bientôt, les jeunes soldats et officiers ukrainiens ayant fait leurs preuves sur les champs de bataille prendront la place des vieux rétrogrades de l’Etat-major.



En Ukraine, l'armée secrète de Pravy Sektor

Du groupe ultranationaliste radical né à Maïdan, à Kiev, a émergé une unité paramilitaire disciplinée, à la fois crainte et respectée dans la guerre du Donbass. Des soldats hors la loi, aussi utiles qu'inquiétants pour le gouvernement.
De notre envoyé spécial à Pokrovske  (région de Dnipropetrovsk)
Il est midi, le soleil frappe droit sur le gravier du camp retranché de Pokrovske. Des rangées de combattants nationalistes s'assoient sous le plafond décrépi de la cantine de cette ancienne colonie de vacances pour petits pionniers soviétiques.
Volia attaque son assiette de bouillie de sarrasin, alors que les commandants déjeunent à quelques tables de là. «Pourquoi j'ai rejoint Pravy Sektor? Je veux défendre ma patrie. Mais au ministère de la Défense, il y a juste des traîtres, et je ne veux pas me battre aux côtés de traîtres, explique Volia. Je veux pas juste mourir, je veux me battre et je veux la victoire.» Patriote, nationaliste, fasciste? «Je fais pas gaffe aux esprits dérangés. Ils ont le droit de dire ce qu'ils veulent, je vais pas les priver du droit de critiquer!»
(Le Figaro, pour les abonnés) 











3 commentaires:

  1. J'ai l'honneur de connaitre et d'aider cette fille! Elle a une bien plus grosse paire de couille que 90% des mecs que je connais ici! Les femmes ukrainiennes ont un sacré caractère...

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  2. Eh oui... Moi je ne la connais pas, mais c'est courageux de se battre contre un pays aussi puissant que la Russie en n'ayant aussi peu de soutiens des pays d'Europe de l'ouest (encore heureux que l'on ait annulé la livraison des Mistral. Mais dommage qu'il y ait eu le transfert de technologie)
    Il semble que bon nombre d'internautes français soient très forts... virtuellement. Poutine a trouvé ici en France, grâce aux frontistes obéissant à leur cheftaine poutiniste, une main d'oeuvre abondante qu'il n'a même pas besoin de payer pour propager sa propagande.

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    1. Bah, ces connards sont fort pour vociférer, mais est ce que l'un d'eux à déjà envoyer ne serait ce qu'un taille crayon à la Novomerda?

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