Ce Brésilien a été condamné en janvier 2017 pour avoir combattu dans l’est du pays aux côtés des groupes séparatistes soutenus par la Russie. Après un an de prison, il n’aura pu goûter qu’à quelques semaines de liberté avant que des nationalistes ne s’émeuvent de sa présence à Kiev et ne décident de le capturer. Un coup de force entériné quelques jours plus tard par une cour de justice ukrainienne, qui prononcera début mai deux mois de détention provisoire à l’encontre du Brésilien.
« Une trentaine d’attaques » depuis un an
Rafael Lusvarghi n’est pas le seul à avoir été victime de la justice particulière de l’extrême droite ukrainienne. Confrontées à une multiplication des incidents depuis le début de l’année, les organisations de défense des droits de l’homme tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme. Amnesty International a répertorié « une trentaine d’attaques » depuis un an ayant visé des organisations féministes et LGBTI, des militants de gauche ainsi que des RomsPour les ONG ukrainiennes et, plus discrètement, les chancelleries occidentales, cette recrudescence d’activité est d’autant plus problématique qu’elle s’explique en partie par l’impunité dont bénéficient le plus souvent ces groupes. Sur la trentaine d’attaques répertoriées par Amnesty International, une seule a pour l’heure abouti à l’ouverture d’une procédure judiciaire. « Nous savons qui sont ces gens, ce sont toujours les mêmes, assure Ganna Grytsenko, sociologue spécialisée dans les mouvements d’extrême droite. Si la police voulait les arrêter, le problème pourrait être résolu très vite. »
Faible dans les urnes « mais puissante dans la rue »
Mais dans un contexte de désaveu profond des Ukrainiens à l’égard de leur classe politique, « le gouvernement craint un affrontement direct avec ces groupes nationalistes », affirme Vladimir Fesenko, un politologue ukrainien. Une crainte qui laisse le champ libre à l’extrême droite, faible dans les urnes « mais puissante dans la rue », précise-t-il. Volodymyr Ishchenko, un spécialiste des mouvements sociaux en Ukraine, voit, lui, dans ce laisser-faire un problème de « déni systématique de la société civile ukrainienne concernant la nature et l’influence de ces groupes ». Pour ce chercheur ukrainien, la participation de plusieurs de ces mouvances radicales à la révolution de 2014 puis au conflit dans l’Est du pays en ont fait des figures du nationalisme ukrainien difficiles à remettre en cause.---------------------------------------------------
La guerre entre dans sa 5e année
6 avril 2014. Dans l’est, des manifestants pro-russes s’emparent de bâtiments officiels à Kharkiv, Donetsk et Lougansk. Kiev déclenche une « opération antiterroriste » contre les séparatistes. Début de la guerre du Donbass.
12 février 2015. Signature des accords de paix Minsk 2 entre rebelles et Kiev à la suite d’une médiation franco-allemande en présence de Vladimir Poutine.
2016-2018. Les combats se poursuivent sur la ligne de front malgré la succession de trêves. Au cours des cinq derniers jours, neuf décès de combattants ont été enregistrés dans l’est de l’Ukraine. Depuis son déclenchement en 2014, le conflit a fait plus de 10 000 morts.
Fabrice Deprez (à Kiev)
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