Le
23 août 1989, en souvenir du funeste pacte germano-soviétique
(appelé aussi Pacte Molotov-Ribbentrop) signé 50 ans plus tôt,
l'Estonie, la Lettonie, et la Lituanie formèrent « la VoieBalte » (Baltic Chain ou Baltic Way). Une chaîne humaine de 2
millions de personnes relia Tallinn, Riga, et Vilnius (les capitales
des trois pays Baltes) sur plus de 650 kilomètres!
Le 23 août 1939, l'URSS, représentée par Viatcheslav Molotov, et l'Allemagne nazie, représentée par Joachim von Ribbentrop, signèrent à Moscou un traité de non-agression entre l'Allemagne et l'Union de Républiques Socialistes Soviétiques, plus communément appelé Pacte germano-soviétique, ou encore Pacte Molotov-Ribbentrop, du nom des signataires.
Le traité proclamait un renoncement au conflit entre les deux pays, ainsi qu'une position de neutralité dans le cas où l'un des deux pays signataires serait attaqué par une tierce partie.
Mais
le traité comportait également plusieurs protocoles restés
longtemps secrets qui déterminèrent le destin des Etats Baltes
pour 50 ans. Dans ces protocoles, les deux puissances totalitaires
s’entendaient pour se partager la Pologne et pour désigner la
frontière nord de la Lituanie comme ligne de partage entre leurs
« sphères d’influence ». Ainsi, la Finlande,
l’Estonie et la Lettonie tombaient dans la sphère d’influence
soviétique, la Lituanie dans celle de l’Allemagne.
Ne
craignant pas une interférence de l’URSS, Hitler
envahit donc la Pologne le 1er
septembre 1939, ce qui conduit à la deuxième guerre mondiale par
l’intervention, le 3 Septembre, de la France et de la
Grande-Bretagne volant au secours de leur allié polonais. De son
côté, l’URSS envahit la Pologne par l’est le 17 Septembre, à
partir de l’Ukraine et de la Biélorussie. Le 28
septembre 1939, les deux puissances totalitaires signèrent un
nouvel accord de délimitation des frontières, avec un accord secret
complémentaire par lequel la Lituanie tombait, à présent, dans
la sphère des intérêts soviétiques.
Après
que l’URSS ait envahi la partie orientale de la Pologne, à partir
du 17 Septembre 1939, elle offrit « généreusement » à
la Lituanie la région de Vilnius, occupée par les Polonais depuis
1920 (2 Octobre 1939). Mais, en contrepartie, L’Union soviétique
exigeait la signature d’un nouvel accord lui permettant d’établir
des bases militaires avec 50 000 hommes sur le territoire lituanien.
Le gouvernement lituanien, alors installe à Kaunas, essaya de
résister quelques jours mais il céda le 10 Octobre 1939,
après avoir obtenu que le nombre de militaires soviétiques soit
réduit à 20 000.
Des
accords identiques furent imposes à la Lettonie (5 Octobre) et à
l’Estonie (27 Septembre). La Finlande refusa un tel traité et, le
30 Novembre 1939, l’Armée Rouge l’envahit. Malgré une défense
héroïque, la Finlande fut obligée de signer un traité d’armistice
le 13 Mars 1940, perdit un partie de son territoire, mais garda son
indépendance.
Le
30 Mai 1940, le gouvernement soviétique accusa, sans aucun
fondement, les autorités lituaniennes d’organiser des provocations
contre l’Armée Rouge. Bien que le gouvernement lituanien ait
accepté, le 14 Juin 1940, un ultimatum de l’Union soviétique,
celle-ci envahit la Lituanie le 15 Juin 1940 avec 15 divisions (150
000 soldats !). Dès le 16 Juin, avec l’arrivée de l’adjoint
du Commissaire aux Affaires Etrangères de l’URSS, Vladimir
Dekanozov, ancien du NKVD, la soviétisation du pays commença.
Dekanozov nomma le 17 Juin un gouvernement fantoche avec comme
« Premier Ministre » Justas Paleckis.
Pendant
ce temps-là, les Allemands purent envahir
la France par
une Blitzkrieg,
tout en étant tranquilles à l’est …… En outre,
la Gestapo livra
au NKVD (police
politique de l’URSS, gérante du goulag) les réfugiés russes
présents sur le territoire allemand et réclamés par l'URSS, en
échange de quoi l'URSS livrait à l'Allemagne de nombreux réfugiés
antifascistes allemands et autrichiens réfugiés en Union
soviétique.
(suite ici)
C'est pas secret, c'est discret
Concernant la Lituanie et la propagande russe : billet de Symmaque :
La Russie mène une guerre de l'information en Lituanie.
Traduction/résumé d'un article sur les méthodes de désinformation utilisées par les Russes contre les pays baltes en particulier et dans le monde en général.
[...]La Lituanie est l'un des nombreux pays où la Russie mène une guerre
dans le but de conquérir les cœurs et les esprits : une guerre de
l'information. C'est une guerre qui est menée à la télévision, sur
internet et dans les journaux, sans aucunes pertes humaines. Le but,
toutefois, est le même que celui d'une guerre classique : prendre le
contrôle des processus politiques de l'état ennemi. Pour obtenir ce
résultat, aucune présence militaire n'est requise. Dans des
circonstances favorables, la guerre psychologique associée à des
pressions politiques peut suffire à prendre le contrôle des principaux
processus politiques d'un autre pays.
Cet article cherche à expliquer les caractéristiques de la guerre
psychologique : ses buts, ses moyens et ses conséquences. La Lituanie
doit d'une manière ou d'une autre trouver un moyen de combattre les
tentatives explicites de la Russie d'utiliser le soft-power pour
influencer le peuple lituanien. Dans un premier temps l'article expose
les attaques de la Russie contre la Lituanie en 2013 dans le cadre de la
guerre de l'information, ainsi que les mesures prises par cette
dernière pour les contrer et les conséquences de cette confrontation.
Ce type de guerre ne se borne pas à la simple propagande. Les acteurs du
monde des affaires, du développement démographique et du monde de la
culture sont aussi importants pour comprendre entièrement ce type de
conflit. La désinformation est le concept central de la guerre de
l'information, c'est elle qui est utilisée pour duper le groupe cible.
Alors que la propagande est utilisé pour influencer les émotions du
groupe cible, la désinformation sert à influencer la rationalité de la
prise de décision du groupe cible. En soutenant des conclusions
erronées, en partie fondées sur de purs mensonges, l'assaillant tente de
promouvoir sa propre vision du monde.
La Russie est engagée dans ce que l'on peut appeler une guerre de l'information. Celle-ci diffère de la simple diffusion de l'information de plusieurs manières. A la différence d'une simple opinion exprimée lors d'un débat public, une attaque informationnelle cherche à causer des dégâts et non à fournir une opinion sur un sujet donné. Lorsque quelqu’un commet un acte de guerre par le biais d'un attaque informationnelle, il cherche à désinformer, à déstabiliser et finalement à supplanter le contrôle qu'a l'ennemi de son propre territoire. L'objectif est d'accroître sa propre influence tout en amoindrissant celle de l'ennemi. Ainsi ces attaques se produisent sur de longues périodes et sous la coordination d'un émetteur principal qui agit rarement à découvert.
La Russie est engagée dans ce que l'on peut appeler une guerre de l'information. Celle-ci diffère de la simple diffusion de l'information de plusieurs manières. A la différence d'une simple opinion exprimée lors d'un débat public, une attaque informationnelle cherche à causer des dégâts et non à fournir une opinion sur un sujet donné. Lorsque quelqu’un commet un acte de guerre par le biais d'un attaque informationnelle, il cherche à désinformer, à déstabiliser et finalement à supplanter le contrôle qu'a l'ennemi de son propre territoire. L'objectif est d'accroître sa propre influence tout en amoindrissant celle de l'ennemi. Ainsi ces attaques se produisent sur de longues périodes et sous la coordination d'un émetteur principal qui agit rarement à découvert.
[...] La stratégie de la Russie vis-à-vis des pays baltes cible souvent
les relations de ces trois pays avec l'UE et l'OTAN. Chaque pas que la
Lituanie fait vers l'Occident doit être suivi d'une conséquence.
[...]En 2013, la candidature de la Lituanie a été la cible de plusieurs
de ces attaques, leur but était de porter le discrédit sur la politique
intérieure lituanienne et sur ses engagements internationaux : le Partenariat Oriental et le sommet de Vilnius.
Dans le même temps, la Russie cherche à diminuer la visibilité de la
Lituanie auprès des autres nations afin d'affaiblir le soutien
international dont elle bénéficie. Elle y associe les outils de pression
économiques habituels, particulièrement dans le secteur de l'énergie,
autant que des cyberattaques.
La désinformation visant à discréditer l'OTAN et la Lituanie a augmenté
pendant la crise à Kiev et le conflit en Ukraine. Des rumeurs que des
mercenaires de l'OTAN entraînés en Lituanie avaient tiré sur les
manifestants ont circulé dans les médias russes.
[...] Dans ce cadre, il est aussi pertinent de s'intéresser à complexité
de l'histoire politique. Même l'histoire médiévale de la région est à
considérer. Il y a un conflit sur la manière dont l'histoire médiévale
de la Lituanie doit être racontée. Cela concerne surtout la question de
l'identité des Lituaniens de cette époque. Tout est ramené à une
question de citoyenneté et de nationalité qui ne se posait pas en ces
termes au Moyen-Age. Aujourd'hui les universitaires biélorusses
affirment que le Bélarus moderne est le descendant légitime du Grand
Duché, tandis que les Lituaniens prétendent, bien sûr, que la Lituanie
actuelle en est la véritable héritière. L'intérêt de la Russie est ici
de promouvoir la version slave, biélorusse, de l'histoire.
En 1944, les Soviétiques occupent un nouvelle fois les états baltes.
Cette occupation va provoquer une guerre de résistance qui durera une
décennie. [...] Le résultat de la répression des Soviétiques lors de
cette "guerre après la guerre" fut la mort de 20.000 civils accusés de
soutenir la guérilla lituanienne. 186.000 personnes furent arrêtées ou
emprisonnées. Des 118.000 personnes déportées, 53.000 moururent en
captivité ou des conséquences de leur captivité.
Des relations tronquées de ces atrocités et de la réduction du mouvement
indépendantiste servent de prétexte à la légitimation de l'occupation.
La résistance (NdT : les Frères de la Forêts)
y sont figurés comme des tueurs de Juifs et des criminels - ennemis du
peuple lituanien - et pas comme des combattants de la liberté. Cette
version était évidemment celle qui avait cours pendant l'occupation
soviétique, mais elle a été ressuscitée récemment. En mai 2013, Poutine a
décoré les vétérans du NKVD qui ont participé à la répression dans les
années 40 et 50.
Un autre événement historique d'importance visé par la guerre de
désinformation est le combat pour l'indépendance à la fin des années 80
et au début des années 90. Les violentes confrontations entre les
manifestants pacifiques et le "Groupe Alpha" des forces soviétiques le
13 janvier 1991 en est un exemple. Durant ces affrontements 14
Lituaniens furent tués et des centaines furent blessés. En 2013, un
documentaire fut diffusé sur une chaîne de télévision russe qui
prétendait que les tirs étaient l’œuvre d'agents infiltrés lituaniens
qui voulaient discréditer les forces soviétiques. Le documentaire fut de
nouveau diffusé en 2014 par la chaîne NTV-Mir, propriété de Gazprom, en
représailles le gouvernement lituanien bannit la chaîne pour 3 mois.
(!!!)
Dans l'expression "soft power" (NdT puissance douce) les deux
termes semblent s'exclure l'un l'autre. D'un côté, le soft power peut
être considéré comme un complément naturel à la diplomatie
traditionnelle aussi appelée diplomatie publique. D'un autre côté, il
peut servir de prétexte à des interventions dans les affaires
intérieures d'autres pays. Une raison souvent invoquée dans ce but, est
la défense de la sécurité et des droits de l'homme d'une minorité. Le
Président Poutine a lui-même défini le "soft power" comme "les
instruments et les méthodes de réaliser des objectifs de politique
étrangère sans l'usage des armes, de l'information ou d'autres moyens de
pression".
Le soft power russe, miagkaya sila, est largement hérité de
l'Union Soviétique. Pendant la Guerre Froide, l'URSS a diffusé son
influence par le biais de diverses organisations et autres "mouvements
pour la paix". Un autre instrument était les soi-disant Mesures Actives qui incluent la diffusion de la propagande et de la désinformation, mais aussi les assassinats et la répression politique.
[...]Aujourd'hui le soft power russe se concentre sur trois axes : la promotion de la langue russe, de sa culture et de son système éducatif. Une contre-propagande visant à gommer toute image négative de la Russie
dans les médias internationaux, et se concentrer au contraire sur les
soi-disant mauvaises conditions de vis dans les autres pays. On peut
prendre pour exemple le traitement que subirait la minorité russe en
Lituanie. Les attaques contre la Lituanie et d'autres états prétendent
que ces pays mènent des politiques défavorables, voire nuisibles à la
minorité russe.
[...]Le troisième et dernier axe est la tentative de construction par le gouvernement russe d'un réseaux mondiaux par le biais d'organisation d'état telles que Rossotrudnichestvo ou Russkiy Mir.
L'influence au travers d'organisations "civiles" telles que celles-ci
est un autre moyen de concrétiser une politique de soft power. Russkiy Mir, organisme financée par l'état russe (NdT
travaille aussi en collaboration avec l'église orthodoxe pour la
promotion des valeurs chrétiennes contre les "valeurs occidentales"),
a commencé ses opération en Lituanie en 2009, quand un centre consacré à
la langue russe a été créé à Vilnius pour contrer le désintérêt
croissant des Lituaniens pour le russe, et bien sûr pour renforcer les
liens culturels avec la minorité russe.
[...] Le gouvernement russe propose aussi des bourses pour partir
étudier en Russie. Les étudiants baltes semblent préférer faire leurs
études dans les pays de l'UE. Russkiy Mir finance aussi plusieurs
associations culturelles visant la minorité russe. Certaines de ces
organisations ont refusé de révéler l'origine de leurs financements aux
médias lituaniens. L'ambassade de Russie à Vilnius a elle-aussi refusé
tout commentaire.
Rossotrudnichestvo a été créé en 2008 et dépend du Ministère des Affaires Étrangères. [...]Rossotrudnichestvo
possède des bureaux dans 77 pays et compte 600 collaborateurs dont 415
stationnés à l'étranger. Il remplace le KGB dans son rôle de
coordinateur de l'usage du soft power. Il coopère avec des organismes et
des entreprises directement ou indirectement possédés ou contrôlés par
l'état russe, comme les géants de l'information ITAR-TASS, RT, RIA
Novosti.
Russkiy Mir est engagé dans le même type de coopération. En de nombreuses occasions, les centres Rossotrudnichestvo ont
invité des étudiants des universités des pays hôtes à venir à Moscou.
Ces étudiants y ont rencontré plusieurs officiels et politiques russes
de haut-rang. Fin 2013, le directeur du Rossotrudnichestvo de Washington D.C. était sous le coup d'une enquête fédérale pour avoir tenter de recruter un étudiant à des fins d"espionnage.
Rossotrudnichestvo et Russkyi Mir sont des exemples
parfaits des organismes de soft power d'aujourd'hui. Il faut aussi
prendre en compte le fait que les activités actuelles de ces organismes
n'ont pas été imaginées la semaine dernière, mais sont le fruit d'une
réflexion qui dure depuis des décennies. La différence est que la
propagande n'est plus diffusée par un service d'espionnage.
Une part fondamentale de la politique de soft power visant la diaspora russe est le programme Compatriotes.
Le but principal de ce programme est de maintenir les liens avec les
Russes vivant à l'étranger, au travers des médias, de la culture et du
soutien à la diaspora et aux Russes "socialement exposés". Depuis 2006
un programme encourage les compatriotes à revenir vivre en Russie. Bien
qu'un soutien économique ait été proposé, la "repatriation" n'a pas
rencontré le succès escompté.
Pour ceux qui veulent aller plus loin, voici une étude sur le soft power russe en Estonie, on y trouve une étude plus complète et très intéressante du programme Compatriotes (p 12 à 24).
C'est pas secret, c'est discret
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire